Lorsque l’on a un cheval au travail, le plus dur est de le garder en bonne forme physique et mentale. Les blessures musculosquelettiques sont souvent responsables d’arrêts précoces de la carrière sportive du cheval. Entre 2005 et 2011, la longévité de carrière des chevaux de dressage, de CCE et de CSO était en moyenne 3-4 ans. Oui c’est très très peu… Cela est une moyenne et ne veut pas dire que les chevaux étaient complètement cassés après 4 ans, ils ne pouvaient peut-être plus faire de sport mais ils pouvaient continuer de faire du travail léger, de balade, etc. Cela arrive souvent en cas de tendinites ou de desmite par exemple. Il est recommandé par de nombreux professionnels et cavaliers d’attendre la fin de croissance du cheval avant de commencer un vrai travail. Vous avez d’ailleurs probablement vu passer sur les réseaux ces schémas de couleurs montrant les étapes d’ossification du cartilage de croissance chez le cheval.
Cette approche popularisée dans le monde équin va à l’encontre des recherches scientifiques menées chez les humains. En effet, plus un athlète s’entraîne jeune (dans le respect de sa physiologie) et plus son corps s’adapte au sport. Il sera donc plus performant et aura moins de risques de se blesser. Chez le cheval, il y a bien sûr des études à ce sujet et c’est tout particulièrement de ça que nous allons parler dans cet article.
Comme vous le remarquerez peut-être, je vais vous partager des recherches qui ont plus de 20 ans. Il s’avère que l’âge « d’or » de la physiologie équine était entre 1980 et 1990. Le manque de fonds a fait que, désormais, les recherches sont plutôt tournées vers quelque chose qui pourra rapporter directement de l’argent (diagnostiques vétérinaires, compléments, médicaments, etc.). C’est d’ailleurs pour cela que je me bats également au quotidien pour continuer les recherches sur l’échauffement du cheval ! Nous savons que l’échauffement peut diminuer le risque de blessure et augmenter les performances mais en soit, cela ne rapporte pas d’argent directement et il est donc difficile de mener des recherches dans ce domaine.
La vie du poulain :
À l’état sauvage, les poulains sont conçus pour marcher 10km/j dès les 9 premiers jours de leur vie. Oui 10km/j, ce n’est pas rien. Cela leur permet bien sûr de fuir les prédateurs et de se nourrir mais aussi de commencer à construire leur corps, aussi bien d’un point de vue musculaire que cardiovasculaire.
Aujourd’hui, de nombreux poulains sont enfermés dans des stabules dès la naissance H24 ou ne sortent que la journée, si le temps est correct. Dès la naissance, nous allons donc déjà à l’encontre de leurs besoins physiologiques. En Australie, une étude a mis en avant le fait que les chevaux féraux (chevaux domestiques redevenus sauvages) marchent en moyenne 15,9 km par jour et que parfois, il y a plus de 55 km entre le point d’eau et leur endroit préféré de broutage et que, dans ce cas, ils peuvent marcher jusqu’à presque 30 km par jour pour naviguer entre les deux ! (Hampson et al., 2010a)
Ces mêmes chercheurs ont aussi pu observer des poulains de moins de 7 jours qui marchaient déjà en moyenne 7,3 km par jour. Aujourd’hui, il a été mis en avant que des chevaux dans des box-terrasse/stabules de 6*6 m marchaient en moyenne 1,1 km/jour. Ils couvrent donc moins de 10% de leurs besoins physiologiques. A l’entraînement, un cheval de course parcourt entre 1,6 et 3,6 km par tour, nous sommes donc encore loin des 15,9 km du cheval féral. Lors de tests sur des chevaux domestiques vivant au pré, il a été trouvé qu’à partir de 15 ha de surface, les chevaux ne marchaient pas plus de 7 km par jour. Il semblerait donc que le cheval domestique ne marche que la moitié de distance des chevaux féraux/semi-sauvages. Mais même si on se base sur les 7 km par jour, cela veut dire que la vie au box et l’entraînement court et intense du cheval de course ne lui permettent pas de répondre à ses besoins physiologiques. C’est aussi pour cela que certains chevaux développent des tics (tic à l’ours, piétinement dans le box etc.).
Il ne faut pas oublier non plus qu’un cheval seul marchera bien moins que s’il est en groupe. En effet, il a également été prouvé que les chevaux en groupe trottent et galopent considérablement plus qu’un cheval seul, augmentant significativement la distance parcourue par jour. (Sondergaard, 2003).
Maintenant que l’on sait cela, il reste à savoir :
Qu’est-ce qui est optimal aussi bien au niveau de la durée que de la fréquence d’exercice chez le poulain et jeune cheval ?